Mais il faut trouver un apartement, prendre une multitude de rendez-vous, emprunter trains, bus et métros pour se rendre à l’autre bout de la ville et s’entendre dire “Ah bon, je suis en retard d’une demi-heure, on vient de réserver le studio?” ou bien “Non mademoiselle, je sais que vous êtes bien jolie mais je ne veux pas de votre deux pièces avec vue sur un mur de brique, ni sur les poubelles du quartier, ni même sur un terrain vague; et je vous dis zut alors, je trouverais quand même”. Puis un jour, le El s’est arrêté, je suis descendu et à mes pieds, comme une révélation dans la chaude lumière de l’après-midi, j’ai aperçu Bryn Mawr Avenue. Et j’ai décidé que dorénavant, ce serait my Bryn Mawr.
Autrefois retraite estivale privilégiée des riches habitants de Chicago, ce quartier situé sur la rive nord du Lac Michigan est tombé dans l’oubli jusqu’à tres récemment, lorsqu’une société immobilière a acquis la majorité des bâtiments et redonné aux vieilles façades néo-gohiques ou Art Déco leur lustre, couleurs et dorures d’antan. La ville a alors classé le quartier “historique” et les commerces ont suivi, et avec eux les étudiants, jeunes cadres, couples gays, familles immigrées du Nigéria, de Yougoslavie, de Roumanie… A Savannah, les Blancs étaient très bloncs et les Noirs très noirs, mais la faune urbaine et cosmopolite de Bryn Mawr se déclinait dans toutes les nuances intermédiaires, et cohabitait en un joyeux désordre dont je suis tout de suite tombé amoureux. Et lorsque la bonne femme roumaine a écarté les stores vénitiens de ce studio perché au dix-neuvième étage d’une tour de verre et d’acier, j’ai retenu mon souffle devant la ville qui s’étendait à perte de vu. Alors j’ai pris, tout de suite, et j’ai découvert Bryn Mawr.
Chaque jour qui passait apportait son lot de surprises et d’émotions. Je me souviens avoir marché vers le lac Michigan, m’attendant à une étendue marécageuse… et j’ai vu la mer, avec ses vagues, ses goélands, ses bronzeurs sur une plage de sable, ici à mille lieues de l’océan. La côte était longée d’immeubles modernes, le long de Lake Shore Drive, jusqu’au centre-ville dont on pouvait apercevoir, au loin, les gratte-ciels. Mais je me suis vite rendu compte que quelque chose manquait à ce spectacle surréel. Ce qui manquait, c’était l’odeur du sel marin, l’appel du large qui vous prenait violemment au visage à l’approche de l’océan. Oui, ce n’était qu’un lac, un lac d’eau douce.
Bryn Mawr Avenue était bordée de restaurants et boutiques en tous genres. De vieux Bosniaques hagards se retrouvaient autour d’un café, non pas turc mais Starbucks, au milieu des étudiants penchés sur leurs ordinateurs portables. Il y avait toujours de luxueuses berlines garées devant “Francesca’s”, qui faisait un délicieux gazpacho au boeuf, mais c’est dans les charmants bouis-bouis qu’on pouvait s’offrir un gyros grecque ou un pad see-eiw thaïlandais. Mon estomac n’appréciait pas toujours, surtout ce taqueria au coin de Bryn Mawr et Broadway Avenue; mais la serveuse était belle, le juke-box grésillait de rythmes latinos, et les nachos étaient délicieux, surtout avec du poulet et beaucoup de guacamole.
Autrefois retraite estivale privilégiée des riches habitants de Chicago, ce quartier situé sur la rive nord du Lac Michigan est tombé dans l’oubli jusqu’à tres récemment, lorsqu’une société immobilière a acquis la majorité des bâtiments et redonné aux vieilles façades néo-gohiques ou Art Déco leur lustre, couleurs et dorures d’antan. La ville a alors classé le quartier “historique” et les commerces ont suivi, et avec eux les étudiants, jeunes cadres, couples gays, familles immigrées du Nigéria, de Yougoslavie, de Roumanie… A Savannah, les Blancs étaient très bloncs et les Noirs très noirs, mais la faune urbaine et cosmopolite de Bryn Mawr se déclinait dans toutes les nuances intermédiaires, et cohabitait en un joyeux désordre dont je suis tout de suite tombé amoureux. Et lorsque la bonne femme roumaine a écarté les stores vénitiens de ce studio perché au dix-neuvième étage d’une tour de verre et d’acier, j’ai retenu mon souffle devant la ville qui s’étendait à perte de vu. Alors j’ai pris, tout de suite, et j’ai découvert Bryn Mawr.
Chaque jour qui passait apportait son lot de surprises et d’émotions. Je me souviens avoir marché vers le lac Michigan, m’attendant à une étendue marécageuse… et j’ai vu la mer, avec ses vagues, ses goélands, ses bronzeurs sur une plage de sable, ici à mille lieues de l’océan. La côte était longée d’immeubles modernes, le long de Lake Shore Drive, jusqu’au centre-ville dont on pouvait apercevoir, au loin, les gratte-ciels. Mais je me suis vite rendu compte que quelque chose manquait à ce spectacle surréel. Ce qui manquait, c’était l’odeur du sel marin, l’appel du large qui vous prenait violemment au visage à l’approche de l’océan. Oui, ce n’était qu’un lac, un lac d’eau douce.
Bryn Mawr Avenue était bordée de restaurants et boutiques en tous genres. De vieux Bosniaques hagards se retrouvaient autour d’un café, non pas turc mais Starbucks, au milieu des étudiants penchés sur leurs ordinateurs portables. Il y avait toujours de luxueuses berlines garées devant “Francesca’s”, qui faisait un délicieux gazpacho au boeuf, mais c’est dans les charmants bouis-bouis qu’on pouvait s’offrir un gyros grecque ou un pad see-eiw thaïlandais. Mon estomac n’appréciait pas toujours, surtout ce taqueria au coin de Bryn Mawr et Broadway Avenue; mais la serveuse était belle, le juke-box grésillait de rythmes latinos, et les nachos étaient délicieux, surtout avec du poulet et beaucoup de guacamole.